
Il est normal que les chiots perdent un peu de poids au cours des premières 24h, c’est essentiellement une perte d’eau et des premiers excréments, mais cette perte ne doit pas excéder 4% du poids de naissance (Mila et al., 2015). Au-delà, le pronostic vital devient réservé.
La croissance entre la naissance et l’âge de deux jours est un indicateur précieux de l’état de santé du chiot et de ses chances de survie jusqu’à 21 jours. Elle est évaluée par le taux de croissance précoce (en pourcentage) grâce à la formule :
[(Poids à l’âge de 2 jours – Poids de naissance) / Poids de naissance] x100
Une perte de 10 % du poids de naissance est considérée comme normale au cours des 2 premiers jours de vie mais il a été démontré récemment qu’un taux de croissance négatif au cours des deux premiers jours de vie est lié à un risque plus élevé de mortalité néonatale (sur les 21 premiers jours suivant la naissance). La valeur limite du taux de croissance précoce en deçà de laquelle le risque est augmenté est de – 4 (Mila et al., 2015). Dans la population étudiée, près de 40 % des chiots présentant un retard de croissance sont morts au cours de la période néonatale, contre seulement 5 % des chiots présentant un taux de croissance positif. Globalement, 30% des chiots sont en déficit énergétique a l’issue des deux premiers jours de vie et sont donc à risque de mortalité néonatale. Une perte de poids au cours des 2 premiers jours peut indiquer une prise insuffisante de colostrum, essentiel pour le chien nouveau-né, à la fois en raison de son apport énergétique et du transfert d’immunité passive (Mila et al., 2015).
Le risque de décès est multiplié par 8 chez les chiots présentant une perte de poids ≥ 4 % entre les jours 0 et 2. Au-delà de 10% de perte de poids au cours des premières 48h, le pronostic vital devient réservé.
Les chiots doivent ensuite prendre 5 à 10% de leur poids chaque jour (figure 3). Au cours de la première semaine de vie, le besoin énergétique du chiot est de 133 calories/kg/jour en moyenne. Toute perte de poids après les 2 premiers jours doit être un signal pour consulter le vétérinaire et cela peut être un signe précoce de maladie : la perte de poids peut survenir 16h avant l’apparition des premiers symptômes (Root Kustritz, 2011). Une croissance insuffisante peut également témoigner d’une production de lait insuffisante de la mère, une supplémentation par du lait maternisé et/ou une stimulation de la lactogenèse sont alors à envisager (Chastant, 2020).

Le chien, comme les autres mammifères, est une espèce diphyodonte, c’est-à-dire qui présente 2 dentitions : une dentition déciduale de 28 dents et une dentition définitive de 42 dents, 20 à la mâchoire supérieure et 22 à la mâchoire inférieure. On peut parfois lire que la dentition de lait est composée de 32 dents, parce qu’on y ajoute les PM1(première paire de pré molaires) qui sont des dents de lait persistantes (Hawkins, 2001).
Les changements pendant la période pédiatrique sont surtout visibles au niveau des 6 incisives : 2 pinces (I1), 2 mitoyennes (I2), 2 coins (I3) (figure 9).
Figure 9: La denture du chiot (vue latérale de la bouche) ; I=incisives, C=canines, P=pré-molaires (Pollet, 2009)
Les chiots naissent dépourvus de dents et le restent jusqu’à l’âge de 3 semaines.

La température corporelle normale chez le chiot au cours de la première semaine de vie est nettement inférieure à celle de l’adulte. Les nouveau-nés ne génèrent pas de chaleur par le mouvement et n’ont pas de réflexe de frissonnement avant le 6ème jour de vie. La température normale est comprise entre 35°C et 36°C au cours de la première semaine (Root Kustritz, 2011a).
Les structures cérébrales impliquées dans le maintien de la température corporelle étant immatures, le chiot est poïkilotherme. En réalité, il perçoit les variations de température mais n’est pas capable de réguler sa température corporelle. C’est grâce à l’existence d’un thermotactisme positif qu’il lui est possible de trouver les sources de chaleur indispensables au maintien de sa température corporelle et de sa survie (Beaver, 1982).
- Hypothermie
Un chiot est considéré comme hypotherme lorsque sa température corporelle passe en dessous de 35,0°. La prise en charge doit alors être rapide, et le chiot nécessite d’être réchauffé progressivement (pas plus de 1°C par heure). La température extérieure doit également être augmentée pour l’aider à maintenir sa température corporelle. Une fluidothérapie avec du liquide tiède peut être envisagée (pas plus de 2°C de plus que la température du chiot) mais le nouveau-né hypothermique ne doit absolument pas être nourri par voie digestive (en raison de l’iléus paralytique associé).
Les chiots ayant des températures corporelles faibles (inférieures à 33°C) à J1 et J2 ont tous un GMQ (Gain Moyen Quotidien) inférieur à la moyenne, voire négatif (Catteau, 2014a). Les chiots ayant souffert d’hypothermie peuvent développer des anomalies neurologiques ou comportementales (Fox, 1963).
- Hyperthermie
Le chiot nouveau-né peut ne pas générer une vraie fièvre en réponse aux agents pyrogènes pendant les premières semaines de vie tant que la thermorégulation n’est pas mise en place et qu’il n’y a pas de stock important de glycogène dans les muscles et le foie. C’est pourquoi sur un chiot de 1 ou 2 semaines, on doit considérer les maladies infectieuses même en l’absence de fièvre (Miller, 2011).
Cependant, si la température du chiot est supérieure à 38,5°C, il sera considéré comme hypertherme (Catteau, 2014a).

Le volume sanguin du chiot est compris entre 50 et 80mL/kg de poids corporel (Root Kustritz, 2011a) et estimé à 68mL/kg en moyenne (Rosset et al., 2012). Pour que les analyses sanguines soient interprétables, il est important d’avoir une quantité de sang suffisante. Cette quantité dépend du tube de prélèvement utilisé, de l’analyseur et de l’analyse demandée. Les veines périphériques étant généralement trop petites, on privilégiera une prise de sang au niveau de la veine jugulaire, avec une aiguille de 22 ou 25 gauges et une seringue de 3mL. La quantité de sang prélevée ne doit pas dépasser 10% du volume sanguin par semaine, soit environ 0,7mL/100g de poids vif (Rickard, 2011).
Le minimal data-base recommandé pour le nouveau-né inclut un hématocrite et le dosage des protéines totales, du glucose sanguin et de l’urée (Root Kustritz, 2011a).
- Lignée rouge
L’hématocrite décroit fortement dans les 3 premiers jours de vie (Harper et al., 2003; Rosset et al., 2012).
D’après Calvache (2008), l’analyse des différents résultats publiés sur le sujet montre que chez le chiot, les valeurs de la numération des globules rouges, d’hémoglobine et d’hématocrite sont inférieures aux valeurs usuelles de l’adulte entre 1 semaine et 3 mois.
Pour le VGM, les données sont comprises dans l’intervalle de référence adulte chez les chiots de 0 à 6 mois (Calvache, 2008).
Les chiots nouveau-nés présentent des globules rouges macrocytaires avec un volume corpusculaire moyen (VGM) élevé qui diminue au cours des premières semaines (Root Kustritz, 2011a). Les valeurs hématologiques du chiot à l’âge d’une semaine sont données dans le tableau 12.
Chez les chiots de moins de 4 mois, on observe une réponse régénérative supérieure à celle des adultes (Calvache, 2008; Root Kustritz, 2011b).
Tableau 12: Lignée rouge chez le chiot à l’âge d’une semaine- valeurs hématologiques (Earl, 1973).
VGM : volume globulaire moyen ; CCMH : concentration corpusculaire moyenne en hémoglobine ; TCMH : teneur corpusculaire moyenne en hémoglobine ; GR : globules rouges. Les valeurs entre parenthèses sont des valeurs moyennes.
- Lignée blanche
La concentration de globules blancs, de neutrophiles et de lymphocytes diminuent au cours du premier mois de vie mais reste cependant supérieures aux valeurs usuelles rencontrées chez l’adulte. Cette leucocytose du jeune, incluant souvent une neutrophilie et une lymphocytose pourrait être une simple réponse aux nouvelles stimulations du système immunitaire naïf du chiot (von Dehn, 2014). Les valeurs hématologiques de la lignée blanche sont présentées dans le tableau 13.
Tableau 13: Lignée blanche chez le chiot âgé d’une semaine – valeurs hématologiques (Earl, 1973).
VGM : volume globulaire moyen ; CCMH : concentration corpusculaire moyenne en hémoglobine ; TCMH : teneur corpusculaire moyenne en hémoglobine ; GB : globules blancs. Les valeurs entre parenthèses sont des valeurs moyennes
- Plaquettes
A la fin de la première semaine, la concentration plaquettaire sanguine est comprise entre 282 et 560 x 103/µL, pour une valeur moyenne de 352 x 103/µL (Earl et al., 1973).
Les temps de coagulation sont généralement augmentés chez le nouveau-né. Le temps de prothrombine se normalise au cours de la première semaine. La concentration d’antithrombine est également diminuée à la naissance mais rejoint les valeurs adultes au bout d’une semaine (Root Kustritz, 2011a).

La flore intestinale des chiots nouveau-nés se développe progressivement au cours des premiers jours de vie, en fonction de leur environnement, de leur mère et de ce qu’ils ingèrent, jusqu’à former des populations stables de bactéries.
Les structures abdominales peuvent être palpées (rein gauche, intestins, colon et vessie). Le foie ne doit normalement pas être palpable et ne pas dépasser des dernières côtes. Un épanchement abdominal peut être physiologique chez 60% des chiots à 2 jours d’âge et l’origine du fluide n’est pas déterminée (Richard et Toniolo, 2019).
Avant 30 jours, la motilité du tractus digestif est réduite (Prendergast, 2011) et semble être contrôlée davantage par la distension que par une activité électrique dans les 40 premiers jours (Root Kustritz, 2011a).
L’interprétation des radiographies abdominales n’est pas toujours évidente de par la petite taille des animaux et le manque de données de référence sur certains organes spécifiques. De même, la réalisation d’une échographie abdominale peut s’avérer difficile chez le nouveau-né en fonction de sa taille.
Le système digestif du chiot est très fragile et facilement affecté par l’environnement, le régime alimentaire et les pathogènes car les défenses contre les infections sont réduites chez le nouveau-né. Tant que la production d’acides gastriques n’est pas complètement développée, l’acidité de l’estomac du chiot est inférieure à celle de l’adulte, ce qui diminue la barrière chimique et donc les défenses contre les agents pathogènes en permettant le développement d’un plus grand nombre de bactéries (Rickard, 2011).
La production de lipase pancréatique augmente durant les 3 premières semaines de vie, à mesure que le lait s’enrichit en matières grasses. Cette augmentation de production de lipase augmente l’épaisseur de la paroi intestinale. Le pancréas ne produit pas encore d’amylase mais le lait maternel contient cette amylase qui permet au nouveau-né de digérer les sucres du lait dans le tractus digestif (Prendergast, 2011).
Les changements qui ont lieu au niveau du tractus digestif sont de toute évidence corrélés aux changements de composition et de volume de l’alimentation du nouveau-né. En effet, le colostrum est riche en protéines, immunoglobulines, hormones et autres substances qui favorisent le développement de la paroi intestinale. La capacité de l’intestin à absorber des macro-molécules diminue rapidement après la naissance (Hoskins, 2011b).

Les structures abdominales peuvent être palpées mais le foie ne doit normalement pas être palpable et ne pas dépasser des dernières côtes.
Avant la naissance, le foie du chiot est court-circuité par la circulation placentaire grâce au canal veineux (ductus venosus). La fermeture fonctionnelle du canal veineux se fait progressivement au cours des 2ème et 3ème jours de vie et permet au sang de circuler dans cet organe de filtration dès les premiers jours de vie (Center, 2011).
- Métabolisme du glucose
La concentration sanguine en glucose se stabilise dans les 3 premiers jours de vie (Root Kustritz, 2011a).
La glycémie des nouveau-nés est relativement aisée à mesurer : une goutte de sang prélevée à l’oreille suffit pour effectuer la mesure avec un appareil de mesure rapide à bandelette (Silverstein, 2009). Les valeurs observées pour le chiot d’une semaine sont données dans le tableau 33.
Tableau 33 : Intervalles de référence de la glycémie du chiot à l’âge d’une semaine (les valeurs entre parenthèses indiquent des valeurs médianes)
Les chiots ont une mauvaise régulation de la glycémie par rapport aux adultes, ils mettent plus de temps à se remettre d’une hypo ou hyperglycémie, ce qui peut être dû à une insensibilité relative à l’insuline endogène ou, de manière plus générale, à une mauvaise réponse aux hormones de régulation. Le maintien de la glycémie est bien évidemment vital pour le développement neurologique et les nouveau-nés n’utilisent pas bien les autres sources d’énergie (lipides, acides-aminés). L’utilisation des lactates est largement préférentielle pour la glycogenèse chez le chiot, devant l’alanine ou la glutamine, et les lactates sont également utilisés en priorité comme substrat dans le cerveau d’un chiot hypoglycémique. Les corps cétoniques, qui pourraient être une source d’énergie alternative intéressante en cas de sous-nutrition, ne sont pas synthétisés en quantité suffisante chez le nouveau-né (Center, 2011).
Bien que la régulation de la glycémie s’améliore avec l’âge, avant l’âge de 4 mois les chiots peuvent être considérés comme prédisposés à l’hypoglycémie lors d’anorexie ou de déshydratation. Les signes cliniques d’hypoglycémie souvent observés sont les gémissements, l’abattement, les tremblements et le coma (Rickard, 2011).
- Cholestérol et triglycérides
Une hypocholestérolémie modérée est fréquente chez des chiots de 1 à 3 jours (Center, 2011). Les valeurs obtenues par Moon et al (2001) et Gorman (2001) sont présentées dans le tableau 34.
Tableau 34 : Intervalles de référence de la cholestérolémie et de la triglycéridémie du chiot à l’âge d’une semaine
La capacité du foie du nouveau-né à synthétiser des triglycérides et le cholestérol étant plus faible que chez l’adulte, les lipides utilisés par les nouveau-nés proviennent essentiellement de l’alimentation. Chez le chiot, les concentrations en triglycérides et cholestérol sont maximales avant 8 semaines d’âge. (Hoskins, 2011).
- Bilirubine
La capacité hépatique d’absorption, de conjugaison ou d’excrétion de bilirubine des nouveau-nés est remarquablement développée. Certains chiots présentent une bilirubinémie légèrement élevée et un sérum un peu ictérique pendant les 72 premières heures de vie (Center, 2011 ; Themes, 2016). Les valeurs obtenues par Moon et al (2001) et Gorman (2001) sont présentées dans le tableau 35.
Tableau 35 : Intervalles de référence de la bilirubinémie chez le chiot d’une semaine (les valeurs entre parenthèses indiquent des valeurs médianes).
- Acides biliaires
Le dosage des acides biliaires dans le sérum n’est pas un bon indicateur de la santé hépatique pendant la période néonatale. La concentration en acides biliaires mesurée chez des chiots d’un jour et chez des chiots d’une semaine se trouve dans les intervalles de référence de l’adulte (Center, 2011).
- Albumine et protéines totales
La concentration plasmatique ou sérique de protéines totales ou d’albumine chez le chiot de moins de 4 semaines peuvent être en dessous des valeurs usuelles chez l’adulte. Ces valeurs sont données dans le tableau 36.
Tableau 36 : Intervalles de référence de la protéinémie et de l’albuminémie du chiot à l’âge d’une semaine (les valeurs entre parenthèses indiquent des valeurs médianes)
- Activité des enzymes hépatiques
Chez les nouveau-nés de 1 à 3 jours, l’activité des PAL peut être plus de 30 fois supérieure aux valeurs de l’adulte, du fait de la forte teneur en PAL du colostrum. Ainsi, la mesure de l’activité enzymatique des PAL dans le sérum ou le plasma au cours de la première semaine de vie permet d’obtenir des informations importantes sur la prise colostrale et le transfert d’anticorps colostraux associé. De la même manière, l’activité des GGT peut également être utilisée comme marqueur de l’ingestion de colostrum, avec une valeur quasiment 100 fois supérieure aux valeurs de l’adulte (Center, 1991 ; Hoskins, 2011). Une augmentation de l’activité des PAL et GGT dans le sérum n’a donc aucune valeur diagnostique au cours des 2 premières semaines de vie (Hoskins, 2011)
Des différences de valeurs observées entre les adultes et les chiots reflètent une plus faible capacité fonctionnelle du foie chez le chiot pouvant être liée à la maturation des voies métaboliques, à la croissance, à une différence de volume de distribution, de composition corporelle ou de nutrition. L’activité de la phosphatase alcaline (PAL), l’aspartate aminotransférase (ASAT), la γ-glutamyltransferase (GGT), la créatine kinase (CK) et la lactate déshydrogénase (LDH) augmente modérément au cours de la première semaine de vie. L’activité de l’alanine aminotransférase (ALAT) est quant à elle plus faible en début de vie (von Dehn, 2014). Ces différentes valeurs sont présentées dans le tableau 37. Les valeurs de référence de l’adulte en fonction des différents auteurs sont données à titre informatif dans le tableau 32.
Tableau 37 : Intervalles de référence de l’activité des enzymes hépatiques du chiot à l’âge d’une semaines (Les valeurs entre parenthèses indiquent des valeurs médianes)

Après la naissance, le volume systolique du ventricule gauche augmente par rapport à celui du ventricule droit. En comparaison à l’adulte, les nouveau-nés ont une pression artérielle, un volume systolique et une résistance vasculaire périphérique plus faibles mais une fréquence cardiaque, un débit cardiaque, un volume plasmatique et une pression veineuse plus élevés (Moon et al., 2001).
La fréquence cardiaque (FC) normale d’un chiot est de 220 battements par minute (bpm) en moyenne au cours de la première semaine de vie (tableau 54). Le rythme des battements et la petite taille des nouveau-nés rend l’auscultation difficile. Dans les 4 à 5 premiers jours, les chiots répondent à l’hypoxémie par la bradycardie et l’hypotension. La fréquence cardiaque peut alors atteindre 45 bpm et la pression artérielle peut descendre jusqu’à 23mmHg. De manière plus générale, la bradycardie (FC<150 bpm) au cours des 5 premiers jours est une indication d’hospitalisation et est très souvent associée à de l’hypoxémie (Moon et al., 2001).
La fermeture du canal artériel sera complète entre 2 et 5 jours après la naissance. En cas de fermeture incomplète, et donc de persistance du canal aortique, on entendra un bruit surajouté caractéristique à l’auscultation et on pourra réaliser une échocardiographie pour confirmer le diagnostic.
L’innervation autonome du cœur et des vaisseaux est incomplète, rendant la régulation via le baroréflexe moins efficace que chez l’adulte. La contractilité du myocarde n’est pas totalement développée non plus, ce qui limite la capacité d’adaptation cardiaque en cas d’hémorragie, d’hyperthermie ou de déséquilibre acido-basique. Le chiot a un rythme sinusal régulier non associé à la respiration car les réflexes vagaux ne se développent pas avant l’âge de 8 semaines environ (Bright, 2011 ; Rickard, 2011).
Des souffles cardiaques de grade I à III sont souvent observés mais sans incidence car uniquement causés par une augmentation du débit sanguin dans l’aorte ou l’artère pulmonaire ou l’évolution des cloisonnements embryologiques du cœur. Cependant, un souffle cardiaque de grade VI/VI est plus souvent dû à une anomalie cardiaque congénitale et peut être révélateurs de pathologies cardiaques majeures. On observera alors d’autres signes tels que la non-concordance du pouls fémoral avec le choc précordial, des muqueuses pâles ou cyanosées, une distension veineuse, de l’ascite ou une hépatomégalie (Root Kustritz, 2011a).
L’électrocardiogramme (ECG) est rarement réalisé chez les nouveau-nés mais les arythmies et problèmes de conductivité ou de potentiel d’excitation cardiaque peuvent être identifiés chez les très jeunes animaux. Il n’y a pas d’études sur l’évaluation de la taille du cœur et l’échocardiographie est difficile à réaliser sur de si petits animaux, à cause du manque de sondes appropriées et du manque de données bibliographiques et de références.
Electrocardiogramme : L’onde QRS se dirige progressivement vers la gauche, en restant crâniale et ventrale. L’amplitude de l’onde QRS est plus faible que chez l’adulte (Trautvetter et al., 1981).

Au cours du premier jour, la fréquence respiratoire augmente jusqu’à 20-30 mouvements par minute (Root Kustritz, 2011a) puis diminue ensuite entre 10 et 18 mouvements par minute après 24h de vie (Poffenbarger et al., 1990).
Dans les 4 à 5 premiers jours, les chiots répondent à l’hypoxémie par la bradycardie et l’hypotension.

Au moment du part, le rein est encore à l’état de métanephros. Il est complètement immature et doit encore subir trois phases de développement pour être totalement formé vers l’âge de trois semaines (Casseleux, 2007). La maturation fonctionnelle sera, quant à elle, beaucoup plus longue. Les chiots ont donc une capacité limitée à concentrer ou diluer les urines en réponse à une modification du volume de fluide extracellulaire.
Une évolution des mécanismes de régulation intrinsèques du rein est observée chez le chiot, notamment en ce qui concerne le débit de filtration glomérulaire (DFG), le débit sanguin rénal et les flux d’eau et d’électrolytes. L’urémie et la créatininémie sont les valeurs les plus communément utilisées pour évaluer la santé du rein ainsi que l’indice de filtration glomérulaire. L’urémie augmente avec l’ingestion de nourriture mais reste un meilleur indicateur de dysfonctionnement rénal que le dosage de créatinine pendant la période néonatale (Von Dehn, 2014).
- Hydratation
Les besoins hydriques sont de 40 à 100mL/kg/j pour un chiot d’une semaine (cours de physiologie, ENVT, 2015)
- Urémie et créatininémie
L’urémie est proche des valeurs adultes jusqu’à 2 semaines (von Dehn, 2014).
Concernant les valeurs d’urémie et de créatininémie, elles sont été étudiées par plusieurs auteurs mais toutes les études aboutissent à des intervalles de référence significativement différents (Gorman, 2011; Moon et al., 2001; O’Brien et al., 2014; Rørtveit et al., 2015; Rosset et al., 2012).
- Débit de filtration glomérulaire
Le débit de filtration glomérulaire est de 0,13 mL par minute et par gramme de tissu rénal chez le chiot de 2 jours (Heller et Capek, 1965 ; Hoster et Valtin, 1971).
- Equilibre électrolytique
La natrémie semble relativement stable chez les chiots nouveau-nés et la capacité de réabsorption du sodium est similaire à celle de l’adulte. Cependant, les chiots semblent avoir une capacité moindre à excréter l’excès de sodium par rapport aux adultes. Chez les chiots, les concentrations sériques en sodium et chlorure sont légèrement plus basses que chez l’adulte (tableau 61).
Tableau 60: Intervalles de référence du sodium, du potassium et des chlorures chez le chiot d’une semaine, d’après O’Brien et al, 2014
- Analyse d’urine
Pour prélever des urines pendant la période néonatale, on peut provoquer la miction en stimulant la zone génitale. Le minimal data-base d’une analyse d’urine sera alors constitué d’une mesure de la densité urinaire et d’une observation du culot (Root Kustritz, 2011a).
Une protéinurie physiologique pourra être observée au cours des premiers jours de vie. Des anticorps colostraux peuvent également être excrétés dans les urines. Une réabsorption tubulaire incomplète du glucose est fréquemment observée chez le jeune, ce qui peut être corrélé à une plus grande proportion de néphrons immatures. Une glucosurie est détectée dans 50% des analyses d’urines chez des chiots de moins de 5 jours (Poffenbarger et al, 1990)
La densité urinaire pendant cette période est comprise entre 1,006 et 1,017 (Poffenbarger et al., 1990).
Il n’y a aucune différence significative concernant le pH urinaire selon l’âge des animaux. Celui-ci varie entre 6,5 et 8,0 (Casseleux, 2007).

L’examen neurologique est difficile à réaliser et interpréter chez le nouveau-né, compte tenu de l’immaturité du système nerveux et de certains organes sensoriels. De même, des tests plus poussés comme le BAER (Brainstem Auditory Evoked Response), ou Potentiels Evoqués Auditifs en français, permettant d’évaluer la fonction auditive ou l’électro-encéphalogramme (EEG) ne peuvent pas être interprétés de façon objective pendant la période néonatale (Root Kustritz, 2011a).
Certaines capacités, sensorielles ou motrices, n’apparaissent qu’au fur et à mesure de la maturation du système nerveux (Fox, 1964).
L’examen du système nerveux et les tests des différents réflexes sont présentés dans l’annexe 5.
Des électroencéphalogrammes réguliers, qui correspondent à des enregistrements de l’activité électrique du cortex ne montrent pas de différence entre les phases de sommeil et de veille durant la première semaine de vie. Le tracé observé ressemble à celui d’un sommeil paradoxal permanent. Il traduit une activité prédominante de faible amplitude et de fréquence variable (Vastrade, 1986).
- Développement moteur
Pour évaluer la compétence motrice, on peut évaluer la capacité du nouveau-né à se redresser quand on le place sur le dos et le réflexe d’enracinement, c’est-à-dire le réflexe qu’a le nouveau-né à pousser avec le museau lorsqu’on encercle ce dernier avec nos doigts (Root Kustritz, 2011a) (Tableau 70).
Le réflexe de retrait doit être présent mais peut être un peu plus long que chez l’adulte.
Lorsqu’ils sont manipulés, les chiots présentent une dominance des réflexes fléchisseurs jusqu’à 4 jours, ce qui signifie que lorsqu’on les tient par la peau du cou, ils ont tendance à s’enrouler sur eux-mêmes au lieu de s’étendre. Entre 5 et 21 jours, les réflexes extenseurs deviennent dominants, et les chiots ont alors tendance à étendre leur colonne vertébrale et les membres postérieurs lorsqu’ils sont saisis par la peau du cou.
L’appareil locomoteur se développe fortement au cours de cette période : d’abord capables de reptation pour chercher les mamelles de leur mère, les chiots deviennent capables de soutenir leur corps (Fox, 1963). Des différences existent néanmoins entre les races : dès 2 jours, les chiots Husky peuvent se déplacer sur leurs pattes alors qu’il faut attendre 15 jours pour observer le même résultat chez les Labradors (Feddersen-Petersen, 2004).
- Développement sensoriel
Les chiots seront réceptifs à différents stimuli comme la douleur, le froid, les odeurs ou le toucher et présentent un important réflexe de succion.
Des réflexes innés sont présents comme (Fox, 1963) :
– le réflexe de fouissement qui permet au chiot, par thermotactisme positif, de trouver la mamelle. Le chiot n’étant pas capable de maintenir sa température interne, ce réflexe lui permet de capter la chaleur et de conserver une température de survie ;
– le réflexe de pétrissement : le pédalage des antérieurs favorise la sécrétion de lait ;
– le réflexe labial est déclenché lorsque l’on stimule tactilement les lèvres du chiot. Il est associé au réflexe de succion et de déglutition ;
– le réflexe périnéal est déclenché par la mère (toutes les 3 ou 4 heures) lors du léchage du ventre ou de la zone périnéale du chiot. Il permet la miction et la défécation.
– Le réflexe contraction palpébrale : la maturité des nerfs trijumeau (nerf cranial V) et facial (nerf cranial VII) donne lieu, après stimulation de l’angle palpébral, à un réflexe purement sensitif de contraction palpébrale (Imbert, 1979).
– Le réflexe de clignement à la lumière, de nature sous corticale, lié aux nerfs optique (nerf cranial II) et facial (nerf cranial VII), peut être observé entre le deuxième et le quatrième jour. Une lumière vive placée en face provoque une contraction lente de la paupière (Imbert, 1979).
Les chiots sont sourds mais sont capables d’émettre des sons pour communiquer avec leur mère. Le geignement évolue, au cours de la première semaine, en jappement (Giffroy, 1985). Ils sont aveugles : la rétine et le nerf optique (nerf cranial II) sont immatures et les paupières sont soudées.
Tableau 70 : Bilan des réflexes moteurs et sensoriels présents chez le chiot à l’âge d’une semaine. NC = Nerf cranien

Ici, les éléments « clés » du développement comportemental du chiot, souvent dépendants du développement de son système nerveux et de ses capacités cognitives, seront explicités sans s’attarder sur les facteurs environnementaux pouvant interférer avec son évolution.
Certains comportements semblent définir des « stades » au sein même de la période néonatale au sens large. On considérera la période néonatale au sens strict lorsque le nouveau-né est incapable de marcher, d’uriner ou de déféquer seul (jusqu’à environ 3 semaines), la période de détachement à partir du moment où les chiots commencent à se déplacer et s’éloigner un peu de la mère (jusqu’à environ 8 semaines) puis l’adolescence (du sevrage jusqu’à la puberté/taille adulte, de 6 à 15 mois selon les races) (Root Kustritz, 2011b).
Les nouveau-nés passent la majorité de leur temps à dormir au cours des premières semaines de vie. Ils se regroupent autour de la mère ou entre eux mais ne s’éloignent pas de la portée. Les chiots sont immatures à la naissance et entièrement dépendants de leur mère qui les nourrit, les maintient au chaud et stimule leur comportement éliminatoire (Bendaoud-Joubert, 2018).
Le répertoire vocal du chiot est constitué de 3 sons principaux. Chaque son est adapté à la situation : les geignements constituent souvent une demande de soin (faim, froid…). Les glapissements sont plutôt émis dans les situations de détresse, de peur ou de douleur (lorsque la mère écrase ses petits ou quand elle s’éloigne du nid). Les grognements et soupirs signifient une certaine satisfaction, après la tétée par exemple (Giffroy, 1985).

La radiographie osseuse est difficile à réaliser chez le nouveau-né, de par leur petite taille, mais aussi à cause du manque de données de référence et du manque relatif de minéralisation osseuse. Il est généralement recommandé de diminuer les kV de moitié par rapport aux valeurs utilisées chez un adulte pour la même taille ou d’utiliser 2 kVp par centimètre de tissu mou mesuré jusqu’à 40cm d’épaisseur pour obtenir des clichés interprétables. On observera physiologiquement la présence des cartilages de croissance et la non fermeture de certaines articulations chez le chiot (Root Kustritz, 2011a).
- Tonus musculaire et mobilité
Le nouveau-né doit essayer de se hisser sur ses membres antérieurs ou de pousser sur ses membres postérieurs dans les 10 premiers jours. Le chiot commence à essayer de marcher à environ 14 jours. Les chiots plus grands ou plus lourds pourront mettre un peu plus de temps avant de commencer à se déplacer (Root Kustritz, 2011a).
- Calcium et phosphore
Le calcium et le phosphore sont importants pour une bonne croissance osseuse mais aussi pour la contraction musculaire. La concentration sanguine en calcium est très élevée chez les chiots de moins de 8 semaines et redescend jusqu’à atteindre les valeurs de l’adulte vers 1 an.
- Cartilage de croissance et ossification
Les os des chiots sont généralement moins minéralisés que ceux des adultes. Ils présentent des zones de croissance métaphysaires, un cartilage parfois plus épais et de nombreux centres d’ossification secondaires mais cela est physiologique. Ces centres d’ossification apparaissent au cours de la croissance, plus ou moins tôt selon l’os considéré.
Les os d’un très jeune animal (moins de 2 mois) peuvent apparaitre comme irréguliers, notamment au niveau des métaphyses qui sont un site actif de remodelage. Cette zone est appelée « zone de réduction » et a une surface périostée rugueuse et irrégulière. Une ligne radio-transparente est visible entre la métaphyse et l’épiphyse et peut mimer une ligne de fracture ou un espace articulaire. Ces lignes vont se réduire au cours de la croissance jusqu’à ce que l’épiphyse et la métaphyse fusionnent pour former une cicatrice radio-opaque.
Les espaces articulaires semblent plus larges chez le jeune animal puisque le cartilage apparait comme un tissu mou de même opacité que le liquide synovial et que la capsule articulaire mais en réalité, les espaces articulaires ne sont pas plus grands. En cas de doute sur l’opacité des tissus mous sur les radiographies, il faut penser à radiographier le membre opposé à titre comparatif (J. Hoskins, 2001).
De par la diversité entre les races canines, entre les portées et entre les individus, il est très difficile d’établir un tableau de valeurs de référence pour toutes les données osseuses. L’idéal, lorsque les clichés concernent les membres de l’animal, est la comparaison avec le membre opposé et de garder les clichés de l’animal pour suivre l’évolution entre 2 examens (J. Hoskins, 2001).
Les tableaux suivants serviront de référence pour l’âge d’apparition et de fermeture des différents foyers d’ossification (tableaux 66, 67 et 68).
Tableau 66 : Age d’apparition et de fermeture des centres d’ossification des os des membres thoraciques du chiot, d’après Hoskins, 2001
Tableau 67 : Age d’apparition et de fermeture des centres d’ossification des os des membres pleviens du chiot, d’après Hoskins, 2001
Tableau 68 : Age d’apparition et de fermeture des centres d’ossification des os du bassin du chiot, d’après Hoskins, 2001